L’OSSUAIRE DE NORROY LE VENEUR

Bien que modeste, l’ossuaire de Norroy le Veneur est cependant un des rares vestiges d’une pratique née au Moyen-âge. Comme chaque chrétien aspirait à être enterré au plus près de l’église et de ses reliques (ad sanctos), le cimetière s’est souvent révélé trop exigu pour accueillir de nouveaux défunts. C’est ainsi que, avant la fin du XI^e siècle, à l’intérieur même de l’espace sacré du cimetière, apparaissent des ossuaires où les restes des corps exhumés par manque de place vont attendre la Résurrection. En Lorraine, il y a cependant très peu de témoignages d’ossuaires antérieurs à la fin du XIII^e siècle.

Au XIV^e siècle, à cause des épidémies successives, des famines et d’un discours de l’église orienté vers la mort, la construction d’ossuaires augmente. Ils se multiplient après le concile de Trente (1545-1563) dans un climat religieux qui encourage le culte des reliques.

Au XVII^e siècle, beaucoup d’entre eux ont été dévastés ou abandonnés lors de la guerre de Trente ans et, sous l’épiscopat de Georges Aubusson de la Feuillade (1669-1697), les visites canoniques pointent la nécessité de les remettre en bon état. Les mêmes recommandations sont données jusqu’à la seconde moitié du XVIII^e siècle. Toutes les ordonnances épiscopales de cette époque incitent à l’amélioration de l’état des ossuaires ou déplorent leur manque d’entretien. Ils sont considérés comme faisant « partie des choses nécessaires pour assurer le service paroissial » au même titre que l’église, l’autel, les fonts baptismaux ou le cimetière, au point qu’après 1750, chaque cimetière possède un ossuaire.

Mais au cours du même siècle, l‘évolution des mentalités entraîne le déplacement des cimetières à la périphérie des villes, séparés de l’église, et les anciens ossuaires sont de moins en moins entretenus. Leur destruction dans le diocèse de Metz commence en 1772. Dans le registre des ordonnances épiscopales après visite des églises, après 1862, il n’est plus jamais question d’ossuaires.

Durant le XIX^e siècle, les ordonnances demandant la suppression des ossuaires se multiplient et bien peu d’entre eux échappent à cette injonction : sur les 679 ossuaires lorrains qui ont pu être répertoriés, toutes sources confondues,  par Jean-Michel Lang (Ossuaires de Lorraine, un aspect oublié du culte des morts, Editions Serpenoise, 1998), il n’en subsiste aujourd’hui que 58 !

En 1905, l’abbé Bour, professeur au grand séminaire de Metz, faisait paraître ses recherches sur les ossuaires de Lorraine (Die Beinhäuser Lothringens) dans le Jahrbuch der Gesellschaft für lothringische Geschichte und Altertumskunde.

N. B. Quelques inexactitudes dans la description de l’abbé Bour laissent penser qu’il n’était pas venu lui-même découvrir l’ossuaire de l’église Saint-Pierre, mais s’était servi des notes d’une tierce personne (le curé de l’époque, peut-être ?), comme cela se pratiquait souvent lors de recherches étendues.

Voici ce qu’il notait pour l’église Saint-Pierre (traduction) :

^②    Il y a six pierres tombales contre l’ossuaire ; elles feront l’objet d’une étude ultérieure.

^④  On ne sait effectivement pas à quelle date cet ossuaire a été construit, mais il est antérieur au XVII^e siècle puisqu’en 1684, une visite épiscopale signale que « l’autel du charnier (autre nom d’un ossuaire) de Norroy le Veneur est prêt à tomber ».

Sources :

• Die Beinhäuser Lothringens, Dr R. S. BOUR, in Jahrbuch der Gesellschaft für lothringische Geschichte und Altertumskunde, 1905.
• Ossuaires de Lorraine, un aspect oublié du culte des morts, Jean-Michel LANG, Editions Serpenoise, 1998
• 1665-1862 : Du rétablissement à la disparition des ossuaires dans l’ancien diocèse de Metz, Jean-Michel LANG, Les cahiers lorrains, 1993, n°2